L’engagement est un vieux mot. Il a un accent guerrier. Son malheur lui est souvent venu de l’usage politique qu’on en a fait. Ne faut-il pas des militants pour exorciser la passivité du peuple ?
Des Causes, supposées moins institutionnelles, voire contre-institutionnelles, suscitent aujourd’hui, par-delà les partis, des engagements plus ou moins spectaculaires, voire discrets. Des idéaux qui tentent de se libérer des appareils et des jeux de pouvoir se redessinent sur fond de malheurs présents ou à venir.
L’implication personnelle dans une action qui, à quelques égards, s’impose à ce qu’on appelle communément la conscience donne au travail requis la dignité du désir de l’accomplir en raison d’une finalité digne de ce nom (la Cause).
Il y a une gratuité de l’engagement. Le but poursuivi est au-dessus de l’intérêt personnel. Mais l’engagement, s’il ne répond à un désir profond de celui ou de celle qui s’engage, ne tient pas la route. L’engagé qui « n’y croit plus » est un poids mort pour lui-même et pour le groupe éventuel dont il fait partie.
Il s’agit donc, semble-t-il, à la fois de définir ce qu’il y a au-dessus de l’intérêt personnel (la Cause) et ce dont est fait tout aussi bien cet intérêt personnel. Les difficultés de l’engagement tiennent souvent à la confusion entre ces deux ordres de réalité.
L’engagement doit sans doute associer la lucidité à l’enthousiasme. C’est donc aussi un chemin qui se fait.
Jean-Pierre Bigeault
In : Les Cahiers de l’EFPP, n°31, automne 2020